jeudi 10 novembre 2011

Le Caporal Joseph Eugène Ludovic BLAIS

C'était il y a 93 ans, jour pour jour, après plus de 4 ans d'une guerre sans précédent, l'Armistice était signé mettant fin à un des plus grands drames mondiaux.
C'est donc tout naturellement que j'ai décidé de consacrer ce billet à la Grande Guerre, et à un homme en particulier, le Caporal Joseph Eugène Ludovic BLAIS. Aïeul d'une amie pour laquelle j'ai eu la chance de collecter quelques informations.

Joseph Eugène Ludovic BLAIS est né à Boismé, dans le canton de Bressuire, dans les Deux-Sèvres, le 22 août 1886.


Il est le fils Victor Toussaint BLAIS, scieur de long, et de Marie Augustine LUMINEAU .
Il avait donc 20 ans, lorsqu'en 1906, il commence ses classes. Sa vie militaire ne lui laissera pas beaucoup de répit. Il commença son périple en Tunisie.

En 1830, la France envahit l'Algérie (conquiert diront certains...), et s'installe fortement en Afrique du Nord. La Tunisie voisine, pays ruinée, est obligée d'accepter une mise sous tutelle occidentale. Et c'est en 1878, que la France obtient la totale liberté d'envahir la Tunisie sous prétexte d'aller mater la rébellion Berbère (des tribus Kroumirs), accusée de pénétrer sur le sol français, par l'Algérie...

Le protectorat français débuta donc en Tunisie en 1881, suite à la signature du traité de Bardo, que le dirigeant tunisien dû signer sous la menace de son exécution...difficile de faire autrement...Quelques mois après, ce traité déjà injuste, était consolidé par la signature de la convention de Marsa qui donnait quasiment les pleins pouvoirs à la France sur la Tunisie. Et débute alors, une vrai mission de "civilisation" de la Tunisie, où le Français était présenté comme un être supérieur, face à un Tunisien "indigène" et complètement incapable de diriger son pays. 
Et c'est dans ce climat de tension extrême que débarque le 2nde classe Joseph Eugène Ludovic BLAIS, au sein du 4éme régiment de zouaves. Il officiera en Tunisie d'octobre 1907 à mars 1908. C'est en effet en 1907, que sera créé le groupe des jeunes Tunisiens, groupe contestataire qui souhaitait des réformes !

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 Ensuite, de mars 1908 à août 1909, il sera du côté du Maroc, près de Casablanca, où la guerre "froide" fait rage entre la France et l'Allemagne, dans leur folle course à la colonie...

Jaurès avait demandé d'ailleurs dès janvier 1908, le retrait des troupes françaises du Maroc...
Mais au même titre que la Tunisie, le Maroc sera placé sous protectorat français en 1912. 
 


   
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Enfin, d'août 1909 à 28 août 1910, il retournera en Tunisie, mais dans l'armée de réserve. Il passera d'ailleurs Zouave de 1ére classe, le 15 juin 1909, juste avant son passage dans l'armée de réserve.





Il y aurait encore beaucoup à dire sur la présence des troupes françaises sur le sol tunisien et nord-africain en général, mais je vous invite à consulter cet excellent site.

En 1911, Ludovic BLAIS reviendra en France, où il épousera à Chiché (79), le 3 juillet 1911, la demoiselle NOIRAUD Marie Eloïse. Ils auront deux enfants ensemble, Marcel né en 1912 et Emilienne née le 05 avril 1915, soit exactement 9 mois après la mobilisation générale !
Il sera de nouveau mobilisé, comme beaucoup, le 1er août 1914, au sein du 3éme régiment d'infanterie coloniale, puis au sein du 33éme régiment d'infanterie coloniale, fraîchement créé en août 1914.


















Durant la Grande Guerre, il sera fait Caporal le 1er janvier 1915. 
L'histoire veut qu'il sera dégradé au rang de 2nd classe le 15 septembre 1915 car "à une observation d'un sous officier concernant ses fonctions de Caporal, il avait répondu "je m'en fous". 
On imagine aisément qu'il n'avait pas voulu envoyé la dizaine d'homme sous son commandement, exécuter un ordre imbécile...et il a donc été dégradé pour cela.
Il sera tout de même cité à l'ordre du régiment le 21 décembre 1915 pour "sa belle conduite au combat du 25 septembre" et décoré de la Croix de Guerre.
Et le 5 novembre 1916, il retrouvera même son grade de Caporal !





Malheureusement pour le Caporal Blais, le Général NIVELLE prend la tête des opérations en décembre 1916, et décide en avril 1917 de lancer une énorme opération, le Chemin des Dames sur lequel les Allemands sont présents depuis septembre 1914 et qu'ils ont eu le temps de fortifier....


Ce fut un échec cuisant pour la France puisqu'on estime à 200.000 français morts en deux mois de combat, soit plus de 3.000 hommes par jour !



Cette offensive débutera le 16 avril 1917, et le pauvre Caporal BLAIS, comme bon nombre de poilus, y laissera sa vie. 

 


Il tombera le premier jour des opérations au moulin de Vauclerc, et sur cette photographie de l'époque, on peut voir l'intensité et la rage des combats...




Nous retrouverons son nom dans le Journal de Marches et des Opérations du 3éme Régiment d'Infanterie Coloniale au milieu de dizaines d'autres noms, funeste recensement des pertes de la journée.



Malheureusement, pour plus de 80% des soldats tués ce jour là pour le 33éme Régiment d'Infanterie Coloniale, on ne sait pas ou sont enterrés les corps, ils ont surement terminés à l'ossuaire de Craonnelle où d'un cimetière militaire proche.

 Suite à cet échec, Nivelle sera d'ailleurs vite remplacé par le Général Pétain en mai 1917.

On peut noter qu'en 1917, c'est la date d'entrée en guerre des Etats Unis. Nivelle écrira d'ailleurs à ce sujet, cette petite note que l'on peut retrouver dans les Journaux de Marche et des Opérations de certains régiments :


Pour conclure sur le Chemin des Dames, il faut rappeler que Pétain dû gérer une crise sans précédent dans cette guerre, puisque pour la première fois, l'armée française sera confrontée à des mutineries en masse. Mutineries que l'on peut parfaitement comprendre. 
Après 3 années de guerre et d'horreur, on demandait à des hommes d'aller vers une mort certaine ! A ce titre, "les tribunaux militaires prononcèrent 3 427 condamnations dont 554 à mort"

Cela valut d'ailleurs la création de la fameuse "Chanson de Craonne", créé par des Poilus, et qui fut interdite et réhabilitée il y a peu par le président Giscard d'Estaing. 
Le gouvernement avait promis un million de Francs et la démobilisation complète au soldat qui dénoncerait le créateur de cette chanson, et jamais personne ne fut dénoncée...


Voila, en ce jour d'armistice, je me devais de rendre hommage à nos Poilus, et au Caporal Joseph Eugène Ludovic BLAIS, mort au front, laissant une veuve et deux orphelins,  et qui ne vit jamais arrivé ce message tant attendu par tous :

4 commentaires:

  1. Merci pour Ludovic et pour tous les poilus.

    Ma famille te remercie pour cet hommage et pour ces anecdotes qui nous le rendent plus proche.

    Encore merci

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  2. Je suis d'accord avec Muriel, ces informations réhabilitent un peu notre arrière grand père.
    Merci
    Sébastien, un arrière petit fils...

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  3. Toute la famille de Ludovic Blais vous remercie vivement de l'avoir fait revivre de si belle façon sur votre blog.
    Dommage que ses enfants Emilienne et Marcel n'aient pu eux-aussi en profiter (Ils sont décédés tous les deux). Nous avons une pensée pour eux qui ont, jusqu'à la fin de leur vie, souhaité en savoir davantage sur le sort de leur père, en vain.
    Martine (Petite fille de Ludovic) et la famille Blais-Beilloin.

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  4. Merci à vous, mais c'est surtout Muriel qu'il faut remercier :)
    Et puis, moi je ne suis qu'un petit scribouilleur, un grand merci à Ludovic, et à tous les poilus, sans lesquels, l'Histoire serait bien différente....

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